samedi 26 septembre 2009

C comme Craonne (Chanson de)

- Chanson la plus enregistrée et la plus célèbre de la première guerre mondiale


La Chanson de Craonne interprétée par Marc Ogeret :
http://www.dailymotion.com/video/x30dzv_chanson-de-craonne_events

D'autres versions sur Deezer



- La Chanson de Craonne est adaptée d’un grand succès du café-concert des années qui précèdent la guerre, Bonsoir m’amour, composée en 1911 par Charles Adhémar Sablon (les paroles originelles sont de René Le Peltier).
- Bonsoir m’amour donne à la fois sa musique et sa structure à La Chanson de Craonne : trois couplet et deux, voire trois, refrains, le dernier déjà très différent des deux premiers.

- Une première version détournée, La Chanson de Lorette, est créée début 1916 dans l’Artois lors des combats terribles pour cette colline. L’auteur précis est inconnu. Cette version est reportée par Paul Vaillant-Couturier
- La chanson est ensuite reprise et adaptée selon le champ de bataille : Lorette est remplacée par Champagne, Argonne ou Verdun. Le courrier intercepté montre le succès de cette chanson chez les poilus, qui se la transmettent entre eux.

- En tout état de cause, la chanson dans sa version presque définitive (il faudra juste substituer « Craonne » aux autres noms de lieux, quitte à modifier la prononciation correcte du nom du village, [kran]) est bien antérieure à l’offensive Nivelle et aux mutineries qui la suivent. « Dès sa création, dès 1915-1916, La Chanson de Craonne est l’exutoire de la lassitude et d’une certaine révolte des combattants. En l’associant à la crise du printemps 1917, en en faisant le chant de guerre des mutins, on laisse à pense que la lassitude et la révolte n’ont gagné les poilus que tardivement, alors que de tels sentiments étaient depuis de nombreux mois partagés, et aussi exprimés, pour certains. Recopier ces paroles, les apprendre, avant même de les chanter ou de les reprendre en chœur, c’est adhérer à ce qu’elles expriment. »


- La première mention de La Chanson de Craonne date du 16 août 1917, quand une lettre non signée du 89e RI est saisie qui la mentionne, même si le titre n’est pas encore définitif … Dans son livre La Saignée (1920), Georges Bonnamy rapporte qu’on la chantait dans son unité (le 131e RI) en juin de la même année.

- En 1961, la chanson figure dans L’Histoire de France par les chansons de P. Barbier et F. Vernillat, avant d’être enregistrée officiellement pour la première fois en 1963 par Eric Amado.
- Dans les dernières années, les versions de La Chanson de Craonne se multiplient, tandis qu’elle gagne sa place dans les manuels scolaires et devient pour le grand public le symbole de la première guerre mondiale et du vécu des combattants …


Source principale : Guy Marival, « La Chanson de Craonne de la chanson palimpseste à la chanson manifeste », in N. Offenstadt (dir.), op. cit., pages 350 à 359





Texte de la chanson (paroles retranscrites par Paul Vaillant-Couturier)

Quand au bout d'huit jours le r'pos terminé
On va reprendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile
Mais c'est bien fini, on en a assez
Personne ne veut plus marcher
Et le cœur bien gros, comm' dans un sanglot
On dit adieu aux civ'lots
Même sans tambours, même sans trompettes
On s'en va là-haut en baissant la tête

Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours
De cette guerre infâme
C'est à Craonne sur le plateau
Qu'on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C'est nous les sacrifiés

Huit jours de tranchée, huit jours de souffrance
Pourtant on a l'espérance
Que ce soir viendra la r'lève
Que nous attendons sans trêve
Soudain dans la nuit et le silence
On voit quelqu'un qui s'avance
C'est un officier de chasseurs à pied
Qui vient pour nous remplacer
Doucement dans l'ombre sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes

Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours
De cette guerre infâme
C'est à Craonne sur le plateau
Qu'on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C'est nous les sacrifiés

C'est malheureux d'voir sur les grands boulevards
Tous ces gros qui font la foire
Si pour eux la vie est rose
Pour nous c'est pas la même chose
Au lieu d'se cacher tous ces embusqués
Feraient mieux d'monter aux tranchées
Pour défendre leur bien, car nous n'avons rien
Nous autres les pauv' purotins
Tous les camarades sont enterrés là
Pour défendr' les biens de ces messieurs là

Ceux qu'ont le pognon, ceux-là reviendront
Car c'est pour eux qu'on crève
Mais c'est fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève
Ce s'ra votre tour messieurs les gros
De monter sur l'plateau
Car si vous voulez faire la guerre
Payez-la de votre peau


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1 commentaire:

Potemꓘine! a dit…

Merci beaucoup pour ce blog!
Deezer oublie de citer parmi les artistes qui ont repris cette chanson 'les Amis d'ta Femme', groupe nancéen de rock alternatif qui a repris la Chanson de Craonne au début des années 2000. Jusqu'en ce début de XXIème siècle ce texte résonne dans nos mémoires et nous rappelle les souffrances incommensurables qu'ont dû endurer nos aînés, chair à canon destinée à pourrir charogne sur les champs de bataille.